A/LVD. XV. D. G. FR. ET. NAV. REX. Buste enfantin à droite, drapé et cuirassé au-dessous une rose à cinq pétale.
R/SIT. NOMEN. DOMINI. BENEDICTVM. Ecu rond de France couronné.
Réformation, strie d'ajustage.
Argent
42 mm
30,08g
« … Le plus souvent, on voit sous le buste une sorte de petite rose. Ce symbole est la marque distinctive des “réformations”. En effet, les pièces au vertugadin se classent en deux grandes catégories : celles frappées sur flans neufs, assez rares, et celles, beaucoup plus courantes, frappées sur flans réformés, c’est-à-dire refrappées sur d’anciennes monnaies… Cette opération permettait d’augmenter “artificiellement” la valeur des pièces sans même prendre le temps de les refondre. Dans le cas présent, les écus aux trois couronnes, qui avaient été dévalués à trois livres et demi, se retrouvent réévalués à cinq livres par la simple transformation en vertugadins ! Autant de profit pour l’Etat car… lorsque les particuliers apportaient dix anciens écus décriés aux Hôtels des Monnaies, ils en ressortaient avec sept nouveaux réformés et la garantie du roi qu’ils avaient la même valeur en poche ! Est-il nécessaire de dire qu’un tel procédé n’était pas du tout apprécié des usagers…
Et c’est probablement ce ressentiment qui explique l’appellation peu glorieuse, le sobriquet devrait-on dire, par laquelle on désigne aujourd’hui encore ce modèle monétaire qui pourtant, dans les écrits officiels de l’époque, apparaissait régulièrement sous le sobre nom “d’écu neuf”. Mais au juste, qu’est-ce que le vertugadin ? D’où vient ce nom ? Le vertugadin est une déformation d’un mot portugais (“vertugo” vertige) désignant les baleines d’osier ou de métal, sortes de cerceaux concentriques, permettant de créer un volume en cloche sous les robes alors à la mode. C’est la forme circulaire de l’écu de France, inhabituelle il est vrai, représentée au revers de la pièce qui a engendré cette moquerie. En outre, les robes à vertugadin étaient aussi surnommées des “caches enfants”… La jeunesse du roi a probablement aussi conforté cette désignation. On comprend alors pourquoi, sur les types suivants, l’écu de France n’a jamais plus été représenté en rond…
Cela fait donc trois siècles que la vindicte populaire a frappé d’infamie ces monnaies que l’on continue d’appeler “vertugadin”. Et pourtant, en ce début de nouveau règne, la frappe massive de ces écus était des plus importantes, primordiale même, car elle permettait à la fois de faire connaître l’image du nouveau roi, mais plus encore, d’assurer les énormes entrées financières indispensables à l’Etat aux abois. La sagesse populaire sait que la mauvaise réputation est tenace, cela se vérifie également en numismatique… »
Monnaies Royales par Gildas SALAÜN, responsable du Médaillier au Musée Dobrée à Nantes